Le développement touristique et hôtelier à Saint-Gervais
Au milieu du XIXe siècle, l’hôtel des Thermes ne suffit plus à accueillir l’ensemble des patients, auxquels s’ajoutent les premiers alpinistes anglais attirés par le Val Montjoie. Les établissements hôteliers se développent alors dans le village de Saint-Gervais, où trois hôtels coexistent en 1850, dont l’hôtel du Mont-Joli.
En 1868, la commune prend le nom de Saint-Gervais-les-Bains, avant d’être classée en station climatique en 1893. Lors de la catastrophe naturelle survenue dans la nuit du 11 au 12 juillet 1892, qui coûte la vie à près de 175 personnes et emporte une partie de l’établissement, l’hôtel du Mont-Joli sert d’hôpital temporaire. Toutefois, la dynamique thermale et touristique demeure, tandis que les thermes sont reconstruits dès 1894 plus en aval. Avec l’arrivée des touristes anglais, bon nombre d’hôtels prennent des noms anglicisés. L’hôtel du Mont Joli devient donc le Mont Joly, à l’instar du Splendid Hotel, ou encore du Royal Hotel. Enfin, la construction de l’arrêt du tramway du Mont-Blanc au Nid d’aigle entre 1907 et 1912 constitue le point d’orgue de l’essor économique de Saint-Gervais-les-Bains, avant les bouleversements du XXe siècle.

Milieu XIXe siècle :Le premier hôtel du Mont-Joli et « l’aile sarde »
La date exacte d’ouverture de l’hôtel Mont-Joli n’est pas connue. Sa première mention date de 1853, lorsqu’on peut lire dans un guide touristique que « l’hôtel du Mont-Joly est bâti à l’entrée du plateau ; c’est dans cette maison que Madame la duchesse d’Orléans, accompagnée de ses deux fils, avait fixé son domicile, pendant le séjour qu’elle fit l’an dernier dans ces contrées. Entres autres dépendances de l’hôtel on remarque un petit pavillon d’où l’on découvre le majestueux panorama qui se déroule dans le beau bassin de Sallanches ».
La même année, un guide anglais écrit que « l’hôtel du Mont Joly, dans le village de Saint-Gervais est un séjour fort agréable, et que, toutes les fois où j’en trouve l’occasion, je ne manque pas de recommander aux voyageurs. On y trouve des appartements commodes, une grande propreté, une chaire excellente, et dans la personne de madame Rosset l’hôtesse la plus gracieuse et la plus obligeante… ». En 1856, les célèbres alpinistes Charles Hudson et Edward Kennedy témoignent de leur départ du « charmant petit hôtel du Mont-Joli avec tous les vœux de M. Rousset [sic.] son propriétaire. »
Une aquarelle figure l’établissement tel qu’il s’organise alors, avec son aile sud (à droite) conservée aujourd’hui. Cette aile est appelée « l’aile sarde », ou encore le « Mont-Joly colonnes ». Sa datation véritable n’est pas établie. Philippe Rosset, le propriétaire, acquiert les terrains adjacents et est à l’initiative de la transformation de l’hôtel.
Fin du XIXe siècle :La construction de « l’aile faïence »
L’agrandissement de l’hôtel est réalisé entre 1880 et 1884. Philippe Rosset confie sa conception à l’architecte parisien Célestin Longerey, qui fait reconstruire l’aile centrale. L’édifice est d’une grande modernité et fait figure d’exception dans la construction locale, avec son ossature métallique préfabriquée et son décor de bois, de ferronnerie et de faïence.
Il témoigne d’une architecture d’envergure internationale et éclectique, qui rappelle les palaces côtiers, les établissements thermaux ou encore l’architecture ferroviaire. Il est doté d’un vaste jardin d’hiver au rez-de-chaussée, aujourd’hui disparu, qui constituait l’espace de réception. La plaque AM en façade est celle de l’Assurance Mutuelle immobilière et mobilière contre l’incendie de la Seine et de Seine-et-Oise étendue à toute la France.
La construction de « l’aile marquise » au début du XXe siècle
En 1910, madame Rosset fait donation du Mont-Joly à son petit-fils Georges Dorin, installé à Saint-Gervais depuis 1906. Il fait démolir l’annexe nord et entreprend sa reconstruction. Les travaux sont effectués sous la direction de l’architecte stéphanois Martin Augustyniak entre septembre 1910 et juillet 1911 par l’entrepreneur genevois L.M. Bouët et Cie. L’édifice est moins novateur que le précédent sur le plan constructif, mais il possède un riche décor de façade, empreint d’art nouveau. Une marquise monumentale couvre l’escalier d’honneur tandis que des blasons ornent les balcons.
L’établissement devient le Mont-Joly Palace, contient deux-cent chambres qui accueillent jusqu’à trois-cent personnes. Jusque dans les années 1935 le Mont-Joly conserve sa place d’hôtel réputé et luxueux, où s’arrêtent de nombreuses personnalités.