Gauthier Drouin Direction Des Chalets Du TrucGauthier Drouin Direction Des Chalets Du Truc
©Gauthier Drouin Direction Des Chalets Du Truc

Surfréquentation sur le Tour du Mont-Blanc Jean-Marc Peillex lance un appel à la régulation Déclaration du maire de Saint-Gervais

Saint-Gervais, le 19 septembre 2025

En ce début d’automne et cette fin de saison estivale, voici venu le moment du bilan. Surtout, le moment de se poser les bonnes questions : peut-on continuer à laisser nos montagnes subir la surfréquentation et ses conséquences sans agir ?

L’association des amis de l’UTMB Mont-Blanc a récemment publié un rapport de fréquentation pour la commune de Saint-Gervais, en reprenant les données d’un compteur situé entre le Col de Tricot et les chalets de Miage. Le compteur est situé sur trois parcours d’itinérance principaux : la variante du Tour du Mont-Blanc, le GR5 et l’Hexatrek.

Entre le 6 juin et le 1er septembre 2025, le nombre de passage sur le tracé où est situé le compteur est estimé à 44 322, pour une fréquentation journalière atteignant souvent le millier de personnes, sans compter le pic lors du passage d’une course de l’UTMB fin août. Cette variante de l’itinéraire du Tour du Mont-Blanc, surtout dans le sens de la descente, est la raison majeure des passages sur ce secteur.

Des scènes dignes de l’Everest

Outre les chiffres, ce sont des scènes de queue leu-leu semblables à la surfréquentation de l’Everest auxquelles nous assistons. Derrière l’image, les conséquences sont réelles et préoccupantes : érosion accélérée des sentiers, sols fragilisés, faune et flore perturbées par le passage répété des randonneurs. À cela s’ajoutent les nuisances sonores et les déchets, qui dégradent durablement des espaces naturels déjà fragiles.

La surfréquentation pose aussi un problème de sécurité : les sentiers encombrés et les difficultés de croisement rendent les accidents plus fréquents et les services de secours davantage sollicités. Enfin, l’expérience même de la montagne s’appauvrit : comment parler de ressourcement dans la nature quand les panoramas se vivent en file indienne ou quand les traileurs courent en regardant leur montre et ignore les paysages ?

Face à ce constat, la question n’est plus de savoir si la surfréquentation, expression du surtourisme, est un problème, mais comment y répondre pour préserver les espaces pour les générations futures.

J’en appelle donc à une régulation. Pour le Mont-Blanc, j’ai œuvré pendant plus de 15 ans pour que la raison l’emporte sur les folies de certains pseudo-alpinistes, en régulant l’accès via l’APHN (Arrêté de protection des habitats naturels), grâce à l’action du Président de la République Emmanuel Macron. Je souhaite qu’une telle régulation soit également appliquée sur l’itinéraire du Tour du Mont-Blanc. L’interdiction du bivouac et l’obligation de réservation en refuge pour accéder aux sites sont deux solutions qui pourraient permettre aux montagnes de respirer.

Une action collective, pas isolée

Une telle régulation, souhaitée également par les gardiens de refuge, ne peut toutefois pas être portée par la seule commune de Saint-Gervais : elle doit se construire en concertation avec l’ensemble des communes françaises, italiennes et suisses, traversées par le Tour du Mont-Blanc, pour garantir une cohérence et une efficacité réelle.

Il ne s’agit pas de fermer la montagne, ni de la réserver à une élite, mais de trouver un équilibre entre accueil et protection. D’autres sites sensibles dans le monde ont déjà mis en place des quotas journaliers, des réservations obligatoires ou des itinéraires alternatifs pour répartir les flux. Pourquoi nos sentiers ne pourraient-ils pas bénéficier de mesures similaires ?

Réguler, c’est apporter la paix mais c’est aussi donner plus de confort aux randonneurs eux-mêmes : moins de promiscuité, des refuges moins saturés, une expérience plus authentique de la montagne. C’est protéger les guides, les accompagnateurs de montagne et les gardiens de refuge, souvent en première ligne face aux débordements, et redonner à la randonnée son sens premier : la découverte respectueuse d’un milieu fragile et précieux.

Ne laissons pas notre patrimoine commun être transformé en un simple décor de surconsommation touristique.

 

Jean-Marc Peillex,

Maire de Saint-Gervais